Voir du pays
La principale qualité du cinéma des soeurs Coulin, c'est avant tout leur formidable mise en scène, à la fois originale et fluide.
Voir du pays nous fait découvrir le quotidien de soldat(e)s en sas de décompression chypriote, entre Afghanistan et France. On suit d'abord leur arrivée irréelle dans un palace, on se délecte du contraste très cinégénique entre la rudesse militaire et l'exhibition indécente des touristes, puis on entre dans le coeur palpitant du film : il s'agit de se remémorer les coups durs vécus là-bas, pour les exorciser.
A partir de ce moment, les évènements vont s'enchaîner pour le pire, et d'exorcisme, il n'y aura pas. L'égalité homme/femme dans l'armée prendra d'ailleurs au passage un sale coup dans la tronche.
Le film a obtenu le prix du scénario dans la section Un Certain Regard du dernier Festival de Cannes, mais c'est pour ma part la façon de filmer des réalisatrices qui m'a impressionné : alternance de très gros plans sur les visages et de plans d'ensemble superbement cadrés, légères digressions signifiantes dans la lumière ou le grain, rythme du montage, jeux de reflets et de transparence. C'est très beau.
Voir du pays vaut aussi pour son interprétation. Ariane Labed est parfaite, et Soko joue à merveille ce qu'on pense désormais être son propre rôle, regard ombrageux et sourcil brousailleux.
Un sujet original, joliment traité.
Delphine et Muriel Coulin sur Christoblog : 17 filles - 2011 (***)
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