Julieta
Avec Almodovar, on viellit ensemble. Quand il était en âge de tourner Femmes au bord de la crise de nerf, j'étais en âge de le regarder (avec un petit effet retard, car il a quand même 16 ans de plus que moi).
Aujourd'hui, je dois donc être particulièrement bien disposé à recevoir Julieta et ses thématiques (le temps qui passe, le rapport aux enfants qui grandissent, le retour sur le passé).
Il me semble qu'Almodovar, avec ce film, accentue ses rapprochements avec Hitchcock, déjà perceptibles dans certains de ses films précédents.
L'atmosphère créée au début du film est par exemple volontairement mystérieuse. Le flash-back du train est à ce titre exemplaire, et comporte tout ce que le film a d'excellent. Il commence par "J'ai rencontré ton père dans le train". On voit un homme s'asseoir en face de l'héroïne, on pense que c'est lui ! Mais non. Pourtant le rôle de cet homme va être décisif pour la suite. Il règne dans toute cette scène une ambiance qui n'augure rien de bon (le cerf est bizarre, le choc du train est montré à l'aide de ralentis anxyogènes) alors qu'elle est aussi la rencontre sensuelle de Julieta et de Xoan.
Autre similitude avec les films d'Hitchcock : l'attention extrême qu'accorde Almodovar à la forme. Le film est en tous points magnifique formellement : les décors sont sublimes (les couleurs de l'appartement de Julieta !), la musique est envoutante, la mise en scène d'une fluidité magistrale, à l'image de cette séquence incroyable où les deux actrices jouant le même personnage se succèdent dans le même plan. C'est très lentement et avec beaucoup de subtilité que l'intrigue se dévoile petit à petit.
Un très beau film porté par un groupe d'actrices magnifiques, incluant une fois de plus l'impayable Rossy de Palma en domestique acariâtre.
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